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Dix ans de défis pour Lignarex - Chambre de commerce et d'industrie Saguenay-Le Fjord

Dix ans de défis pour Lignarex

Il y a dix ans, la Coopérative forestière Ferland-Boilleau devenait propriétaire de la Scierie Gauthier, qui venait de faire faillite à La Baie. L’usine est devenue Lignarex. « Bien honnêtement, les cinq premières années n’ont pas été faciles. On avait prévu investir 750 000 $ pour repartir tout ça ; finalement, ça nous a coûté 1,5 million $ », explique son directeur général, Éric Rousseau.

Fierté. C’est le premier mot qui vient en tête en voyant l’homme se promener dans la cour à bois qui surplombe le Saguenay et ses immenses parois rocheuses. Si le départ n’a pas été canon, il y a une décennie, on constate que la scierie est aujourd’hui en bonne position.

« Au début, on mettait les prix les plus bas pour réussir à passer à travers. Lignarex a été salutaire pour la coop. Après la crise de 2011, si on avait été une entreprise, on aurait tout fermé ça. On a perdu trois à quatre millions $. On a vraiment fait un all-in ici », explique le gestionnaire, qui est persuadé que le modèle coopératif leur a permis de surmonter les écueils.

En 2015, il fallait une fois de plus sauver les meubles. Un deuxième quart de travail a alors été intégré pour trouver une certaine rentabilité. « C’était la tempête parfaite. Le marché était à terre, le bois coûtait cher et il fallait réinjecter de l’argent pour passer au travers », se rappelle M. Rousseau.

Et cette première décennie mène à la pandémie de COVID-19. « La demande a explosé en juin 2020. Oui, on a fait de l’argent, mais je dirais que sur dix ans, on a surtout rééquilibré les choses. »

« On n’est rien sans approvisionnement »

L’enjeu le plus important présentement pour Lignarex, c’est l’approvisionnement de la matière première. À ses débuts, la scierie détenait une garantie de 95 000 mètres cubes. « On a démarré le deuxième quart sans savoir qu’on en aurait plus. Finalement, on est passés à 150 000 mètres cubes », précise l’ingénieur forestier.

Le 1er avril 2023, le gouvernement québécois fera connaître les nouvelles garanties. Éric Rousseau croise les doigts pour en obtenir 250 000. « C’est ce que mon usine consomme annuellement. J’ai 100 000 mètres cubes à aller chercher dans les forêts privées, aux enchères et sur les lots intramunicipaux. On ne réussit pas toujours à l’obtenir. »

Le plan de rétablissement du caribou forestier est également attendu pour 2023. La Coopérative Ferland-Boilleau concentre ses récoltes principalement dans la Réserve faunique des Laurentides et au sud de la rivière Saguenay. Elle est donc préoccupée par la protection de la harde de Charlevoix et par les répercussions par osmose de ce qui s’en vient. « Quand les entreprises qui récoltent au nord voudront venir plus au sud, ça risque de se bousculer. Quand Résolu manque de bois et appelle au ministère, ç’a un plus gros impact que la coopérative. »

Il ne cache pas que la surprise a été grande lorsque la Commission indépendante sur les caribous forestiers et montagnards a présenté ses recommandations. « Personne ne s’attendait à ça. C’est un constat de protection qui est ressorti. Mais on doit aussi calculer les autres impacts. »

Est-il stressé ? « Il faut être à l’aise avec tout ça, parce que, la forêt, c’est toujours de l’incertitude », répond-il.

Éric Rousseau a surtout hâte de connaître les nouveaux contrats d’approvisionnement pour planifier la suite. « On n’a pas de dettes. On est prêts à investir en optimisation, en robotisation, mais il faut du volume de bois. »

Tournée de l’usine

« De l’extérieur, ç’a l’air bien ordinaire, mais quand vous allez entrer à l’intérieur, vous allez être surpris. Il s’en brasse des affaires ici ! C’est pas loin de 50 millions $ par année et une cinquantaine de travailleurs », avertit le patron avant d’y entrer.

Chaque bille de bois est scannée pour déterminer son diamètre et sa longueur. Elle est ensuite dirigée vers l’ébouteuse, la déligneuse, l’empileuse et la latteuse. L’opération dure entre deux et trois minutes. Le bois est ensuite envoyé à l’usine Alexandre Côté, en Beauce, pour être séché et plané. La coopérative l’a achetée en 2021. « À La Baie, on n’a pas assez d’espace pour le sécher et l’ancienne administration, c’est ce qui a causé leur perte. Les inventaires devenaient trop gros. »

Ici, il n’y a pas de perte. Une fois la bille convertie en l’un des 24 produits possibles, les résidus sont transformés en écorce, en sciures ou en copeaux.

Chaque travailleur a une tâche bien précise. Dans la tour de contrôle, plusieurs écrans permettent de voir la moindre problématique. Lors de notre visite s’y trouvaient Sylvain Côté, en poste depuis 1990, et Mathieu Gagnon, à l’usine depuis quatre ans.

« L’équipe est équilibrée. On a une dizaine de travailleurs ici depuis le début et des plus jeunes », souligne M. Rousseau, qui prend le temps de présenter au Quotidien la seule travailleuse, Mylène Senneville.

Massothérapeute de formation, la pandémie l’a obligée à revoir son plan de carrière. Elle est responsable de l’entretien. « Ma job est super importante. Je dois m’assurer que le bran de scie et les copeaux ne s’accumulent pas dans les convoyeurs, sinon ça s’embourbe et ça bloque », explique-t-elle.

Les employés seront d’ailleurs récompensés vendredi, alors qu’une soirée reconnaissance est organisée.

Source : L'article est paru sur le site du journal Le Quotidien le 8 septembre 2022. Vous pouvez retrouver l'article ici.